Quelques définitions du mot « deuil » du dictionnaire :

Selon le Robert en ligne :

  1. « Douleur, affliction que l’on éprouve de la mort de quelqu’un » : une réaction émotionnelle, un mouvement psychique ;
  2. « Mort d’un proche » : une perte.

Selon le Larousse en ligne :

  • « Perte, décès d’un parent, d’un ami » ;
  • « Douleur, affliction éprouvée à la suite du décès de quelqu’un » ;
  • « Processus psychique mis en œuvre par le sujet à la perte d’un objet d’amour externe ».
  • De quel processus s’agit-il ?

    Le processus de deuil consiste à surmonter la douleur de la mort d’un être aimé, c’est accepter d’en être privé et réussir à réorganiser sa vie en tenant compte de cette absence. En aucune façon, il ne s’agira d’oublier l’être perdu, mais d’ « intégrer », de « digérer » l’expérience de cette perte.

    Ce processus est naturel, il s’enclenche sans qu’on n’ait vraiment à le « commander ». Mais dans certains cas, il est laborieux, compliqué, très long, empêche le déroulement du quotidien, met la vie sur « pause » au point de perdre le goût de vivre et l’envie d’aller de l’avant.

    Combien de temps prend ce processus, pour réussir à accepter l’absence de l’être aimé ?

    Aucune réponse à cette question n’existe, car tout dépend de la relation que l’on avait avec l’être disparu, ce qu’il représentait pour nous, des circonstances de la mort et du vide qu’il laisse en nous. Le processus de deuil est un processus de cicatrisation de la blessure que le décès a provoquée. Il n’y a pas deux processus identiques, même chez une même personne pour deux décès différents. Chaque histoire est unique… histoire dans laquelle nous ne voulons pas rentrer, a priori

    Ce processus de cicatrisation naturel peut éventuellement s’accompagner d’un « travail » volontaire que l’on nomme « travail de deuil » qui correspond à la prise en charge de la cicatrisation par des tiers. Il peut s’agir de psychologues, d’associations d’accompagnement au deuil, d’amis, de membres de la famille… qui vont aider et permettre d’intégrer l’histoire douloureuse dans le nouveau quotidien de la personne endeuillée.

    Qu’est-ce qui fait qu’une personne endeuillée peut avoir besoin d’une aide extérieure ?

    Quand le décès entraîne des « séquelles traumatiques ». En effet, les séquelles traumatiques peuvent ralentir voire empêcher le processus de deuil de se faire naturellement :

    • - Selon le contexte du décès : la brutalité, la soudaineté, la violence, l’effet de surprise ;
    • - Selon l’âge du défunt : une mort qui n’est pas dans « l’ordre des choses » ;
    • - Selon le lien d’attachement que l’on a avec le défunt : plus il est proche et plus c’est difficile ;

    Quels sont les signes qui montrent que l’on a besoin d’aide ?

    Les signes sont ceux d’un « trouble de stress post-traumatiques » et rendent difficile les activités de la vie quotidienne :

    • - Cauchemars, flashs, images intrusives, sons dans la tête,
    • - La hantise que cela recommence (un autre décès par exemple) entraînant angoisses, troubles du sommeil, épuisement,
    • - Des attitudes d’évitement : éviter certains lieux, certaines situations, certaines personnes… en lien avec le décès.

    Certaines personnes sont plus sensibles que d’autres même si elles vivent des expériences similaires, et aucune prédiction ne peut être faite sur qui aura besoin ou non, la démarche est personnelle.

    Parfois le deuil est « absent », ou « excessif », ou « trop long » ; parfois on se sent « enlisé » dans certaines émotions et on ne voit pas d’évolution au fil du temps ; et parfois, le simple fait de se sentir seul suffit pour venir consulter ou parler à quelqu’un « autre » que la famille ou les amis ; ou consulter simplement pour vérifier que tout va bien, que le processus se déroule « normalement », car nous manquons de repères sur ce qui peut être « normal » ou pas.

    Quel « travail » thérapeutique peut-on faire ?

    L’écoute. C’est le travail le plus important. L’écoute thérapeutique en consultation psychologique est un endroit où la souffrance peut être exprimée, sans que l’on s’entende dire : « ni pense plus » ou « passe à autre chose », « tourne la page »…

    Accueillir la souffrance, les réflexions, le cheminement intérieur, va permettre à la personne écoutée de vivre le deuil et d’organiser ses pensées autour de cet événement.

    Le traitement du traumatisme est parfois nécessaire et l’I.C.V. – Intégration du Cycle de la Vie – peut être une réponse que je propose en cas de trouble de stress post-traumatique. Ce traitement permet de « ranger », d’ « intégrer », de « digérer » un événement particulièrement douloureux, et permet de ramener un certain calme psychologique, un meilleur sommeil, et de la sérénité face à la situation vécue. Dans le sujet qui nous intéresse ici, cela peut concerner le temps qui a précédé la mort du proche, l’accompagnement vers la mort, l’annonce de la mort certaine à venir ou l’annonce soudaine de la mort, les circonstances, l’organisation des obsèques, la cérémonie… ou l’ensemble. Et les jours qui suivent… jusqu’à aujourd’hui.

    Quelques séances peuvent permettre à la personne de continuer, ou de commencer, le processus de deuil naturel, qui ne pouvait peut-être pas s’enclencher à cause de l’aspect traumatique de la situation.

    Quand est-on « guéri » ?

    Le deuil évolue par étapes. Il est difficile de repérer clairement ces étapes de façon distincte. Il y a autant de deuils qu’il y a de personnes endeuillées. On peut parler d’ « étapes » en général, cependant, le deuil doit être considéré comme un vécu particulier, pour chaque personne, et pour chaque deuil.

    Il y a le choc : « il ou elle vient de mourir ! ». Et c’est la confrontation à un grand nombre d’émotions, une confrontation à l’absence aussi, le vide. Et le refus parfois d’accepter cette réalité.

    Après les obsèques, certains vivent la fuite des autres, l’envie d’être seul, de retrouver l’être aimé perdu à travers les affaires, les objets. Ce que « les autres » ne peuvent pas comprendre. Les jours se suivent, et se suivent encore… et l’autre est toujours absent. La vie psychique semble ne pas réussir à se restructurer.

    Il peut y avoir une recrudescence de la souffrance plusieurs mois après le décès. Quand « les autres » sont passés à autre chose. Un temps de solitude très intense, pire qu’aux premiers jours du deuil. Cette aggravation apparente du deuil est inévitable et indispensable. C’est une étape de progression nécessaire qui va permettre le dépassement vers une autre étape, une autre construction. Cette phase peut sembler longue et interminable et passe souvent par des émotions très fortes et déroutantes, un vécu dépressif, des idées noires, la peur du futur qu’on doit réorganiser.

    Puis, tout doucement, sans grand chamboulement, lentement, la vie se restructure peu à peu, se réorganise. On pourrait dire qu’il s’agit de la phase d’après, mais, en fait, elle a déjà commencé dans la phase précédente, partiellement, de façon fragmentée, puis s’étend et s’installe, remplit l’espace intérieur : la vie quotidienne s’est réorganisée, restructurée.

    La relation aux autres a changé, la relation au défunt a changé, la relation avec soi-même a changé, la relation à la vie a changé.

    La résolution du deuil réside dans la question du sens que l’on arrive à donner à ce que l’on a vécu. Et le temps n’a pas de règle ici : un an ? 2 ans ? 10 ans ? Toute la vie ?

    Quand l’histoire de cette perte s’intègre dans l’histoire de ma vie, que je n’ai plus à me protéger de cette souffrance, le travail est accompli.